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Pour que le reculer soit aisé, il faut, pendant la
demande du mouvement rétrograde, et son entretien,
respecter deux exigences de la biomécanique :
- allégement de l'arrière de l'assiette (dégagement
de l'assiette), pour libérer la partie postérieure
du dos du cheval, afin de faciliter la flexion
lombo-sacrale ;
- libération de la partie antérieure du dos et
de la partie antérieure des flancs du cheval,
pour ne pas gêner le recul des antérieurs (qui
doivent faire un effort musculaire inhabituel,
inverse de celui de la marche " en avant ").
Pour faire cet important report de poids, libérer
le dos tout entier et la partie antérieure des
flancs du cheval, le cavalier :
- Soulève très légèrement son assiette, sans toutefois
quitter la selle, qu'il " effleure " ;
- Avance légèrement le buste par rapport à la
position " académique " (et ce à titre provisoire),
en le mettant légèrement en deçà de la verticale
(ne pas exagérer le mouvement, c'est inutile et...
inesthétique. Pour prévenir toute exagération,
le cavalier doit tenir la tête verticale et regarder
" loin ") ;
- Met la quasi-totalité de son poids dans les
étriers, ce qui place, pour le cheval, le poids
au niveau des porte-étrivières;
- Ecarte légèrement les jambes (cuisses et genoux
compris) au cours de ces opérations et pendant
le mouvement du cheval.
L'écuyer :
- Vérifie que le cavalier soulève effectivement
son assiette ;
- Rectifie avec la main la position du buste en
l'amenant, si nécessaire, par pression de la main
un peu en avant ou, au contraire, si son avancée
est excessive, vers l'arrière ;
- Empêche le cavalier de regarder l'encolure du
cheval et lui demande de " regarder loin ", ceci
pour la correction de sa position ;
- Attire vers lui de quelques centimètres le pied
du cavalier qui est proche de lui. Les cavaliers,
en effet, sont presque tous dans l'impossibilité
d'écarter légèrement leurs jambes du cheval, suite
à un développement très accusé des muscles intérieurs
des cuisses (un exercice spécifique dans ma méthode
leur permet de le faire ultérieurement).
Les opérations qui suivent sont : la demande du
mouvement, l'entretien du mouvement, la cession
du mouvement et la reprise du mouvement en avant.
La cession du mouvement et la reprise du mouvement
en avant nécessitent la mise en œuvre d'assiettes
antagonistes : application du poids du cavalier
sur le tiers antérieur de la selle ou au niveau
des porte-étrivières ou, au contraire, sur le
tiers postérieur de la selle.
Pour la demande du reculer, le cavalier :
- Lève les mains pour trouver le point de sensibilité.
Ce point est un point de rupture. Si le cheval
est à l'arrêt, cet arrêt est rompu en faveur du
reculer. Si le cheval est au pas, ce pas est rompu
en faveur du reculer.
- Comme pour tout début d'éducation, tout apprentissage,
le cavalier emploie la voix : " reculer ! " ;
- Pas de jambes pour la demande de reculer !
- L'écuyer explique au cavalier que le cheval
comprendra le terme " reculer ! " grâce à la répétition,
ce qui lui permettra, rapidement, d'employer l'aide
unique, la main, puis d'exécuter " en silence
".
L'écuyer insiste :
- Main sans jambes pour commander le mouvement
rétrograde.
Si le cheval ne part pas, il est soit contracté,
soit réticent vis-à-vis de l'exercice.
- Si le mouvement ne se " déclenche " pas au cours
des études premières du reculer, l'écuyer recommande
au cavalier de ne pas augmenter l'action de la
main, ni en force, ni en élévation : le cheval
se tétaniserait.
- Dans ce cas, lors du refus, ou de l'impossibilité
du mouvement, l'écuyer demande au cavalier d'appuyer
calmement ses deux bas de jambes sur les flancs
du cheval, ce qui lui permet de prévenir le cheval
(afin qu'il ne s'inquiète pas) et d'exercer une
pression égale des deux côtés du cheval ;
- Demande au cavalier, après vérification de la
correction de l'action précédente, d'exercer une
pression des deux éperons, sans violence et dans
le calme, main fixe. Le cheval, presque toujours,
commence à reculer ;
Dans le cas, rare, où le mouvement rétrograde
n'est pas déclenché par la pression des deux éperons,
le cheval est contracté, tétanisé.
- L'écuyer met alors deux doigts dans la bouche
du cheval : il touche la langue en les introduisant
par la partie de la barre dénuée de dents. Il
suscite une onde relaxante : le cheval est contraint
de desserrer les mâchoires et de déglutir, ce
qui constitue, en termes équestres, la " flexion
de mâchoire ". Cette onde, qui part de sa bouche,
inonde le corps entier du cheval (principe appliqué
en médecine humaine : " la décontraction d'une
partie du corps entraîne la décontraction du corps
entier "). Le cheval recule ;
- L'écuyer demande au cavalier de cesser l'appui
des éperons dès le début du mouvement rétrograde,
mais de reprendre cet appui dès arrêt non sollicité
;
- L'écuyer demande ensuite au cavalier de tenter
l'exercice sans le secours des éperons et de répéter
jusqu'à ce qu'il puisse déclencher le reculer
avec la main seule.
Pour l'entretien du mouvement, le cavalier :
- Conserve l'application de son poids au niveau
des porte-étrivières et maintient le léger écart
de ses jambes des flancs du cheval ;
- Effectue une descente de main (cession de toute
action) et maintient cette dernière pendant tout
le reculer.
- Autrement dit, le cavalier " ne fait rien ".
L'écuyer insiste :
- Ni main, ni jambes, pendant le mouvement rétrograde.
Pour mettre fin au reculer, le cavalier :
- Cambre le rein (engagement de l'assiette) et
applique tout son poids sur le tiers postérieur
de la selle.
- Le cheval met toujours fin au mouvement rétrograde,
ce qui prouve que l'allégement de l'arrière de
l'assiette par le cavalier pour faciliter le mouvement
est fondamental.
L'écuyer insiste de nouveau :
- Pas de jambes !
- Il fait constater au cavalier que le cambrer
suffit à arrêter, et " net ", le cheval.
Pour la reprise du mouvement en avant, le cavalier
:
- Vousse son rein.
La première fois, il ne se produit rien. C'est
normal, le cheval n'est pas habitué au transfert
de poids de l'arrière (qui a provoqué de façon
mécanique, automatique, l'arrêt du mouvement rétrograde,)
vers l'avant de la selle. Le cheval ne connaît
pas ce langage. L'écuyer va le lui apprendre.
L'écuyer insiste une dernière fois :
- L'écuyer interdit l'usage des jambes parce que
beaucoup de cavaliers doivent être " désintoxiqués
" pour éliminer tout usage des jambes au cours
du reculer ;
- Il insiste pour faire comprendre au cavalier
que l'usage des jambes lui ferait remonter un
tant soit peu les talons et, par conséquent, modifierait
son équilibre ;
- Il insiste : le cheval ne doit analyser, lorsque
cela est possible, qu'une seule intervention "
physique " (le cerveau du cheval est obscurci
par des demandes simultanées), ici " Que veut-il
avec ce transfert de poids ? ;
- L'écuyer emploie la voix (qui est, elle, une
intervention " morale "), la voix impulsive, celle
qui " claque " (différente de la voix caressante
qui indique au cheval qu'il " a bien fait ") :
" pas ! " ;
- Si cela ne suffit pas, l'écuyer tapote l'épaule
ou le passage de sangle (selon les réactions du
sujet), pour mettre le cheval en avant (il demandera
par la suite au cavalier de faire de même, mais,
dans un premier temps, il faut que le cavalier
concentre son attention sur un seul point : le
" jeu de son assiette ", voussure ou cambrer du
rein, ici voussure) ;
- Il explique au cavalier que la répétition va
créer un réflexe conditionné. Dans un premier
temps, le cheval associe voix, tapotement éventuel
de la gaule et voussure du rein du cavalier. Le
tapotement devient rapidement inutile, puis la
voix.
- L'écuyer fait constater au cavalier que la voussure
du rein, très rapidement, suffit à la reprise
du mouvement en avant. L'idéal est atteint : une
seule intervention physique.
Et l'écuyer insiste : le reculer, obtenu avec
la main seule pour le début du mouvement, doit
être poursuivi et interrompu sans main, ni jambes,
et interrompu par le seul jeu des assiettes antagonistes
(cambrer = arrêt et voussure = reprise du mouvement
en avant).
Pour la main seule, le lecteur peut être surpris,
cela ne fait pas partie, en général, de sa pratique
personnelle. Et pourtant, le " père de l'équitation
française ", La Guérinière, procédait ainsi …Quant
à l'écart des jambes (loufoque, diront les sceptiques),
il est recommandé, " au début ", dans un tout
petit passage, quasi illisible tellement il est
minuscule, de l'œuvre du Général Faverot de Kerbrech
et de celle du Capitaine Beudant …
Essayez le reculer, tel que je le préconise, c'est
tout à fait exaltant :
- Le cheval peut faire, sans douleur, de longs
reculers ;
- Le cavalier met fin au mouvement et reprend
le mouvement en avant par les deux bascules du
bassin, par deux mouvements antagonistes, sans
intervention de la main et des jambes ;
- Et le cheval devient de plus en plus subtil
dans sa sensibilité des assiettes antagonistes
…
Exaltant …
Il n'est nullement nécessaire de répéter pendant
des heures pour se faire comprendre du cheval.
Il faut simplement que le cavalier acquière une
certaine précision dans le jeu de son rein. Certains
exercices affinent autant le cavalier que le cheval
...
Pour que le reculer soit un exercice sans forcements
et profitable, il faut respecter un principe :
l'équilibre engendre le mouvement. L'application
pratique principale de ce principe concerne le
point de départ, qu'il s'agisse de reculer, de
prise d'une allure ou du début d'un exercice quelconque.
Le pas ralenti à l'extrême, et le reculer, sont
deux moyens simples et extrêmement efficaces pour
placer indirectement (reculer) et directement
(pas ralenti à l'extrême), les propulseurs sous
la masse (élément du rassembler). C'est même d'une
simplicité enfantine et cela rend ridicules les
efforts désespérés de ceux qui, en même temps,
poussent avec leurs jambes et retiennent avec
leurs mains le cheval, pour tenter de rassembler
leur cheval.
Main sans jambes, dans les deux procédés préconisés
pour placer les postérieurs sous la masse.
L'écuyer insiste auprès du cavalier sur un autre
point :
- Le cavalier ne doit pas oublier l'aspect psychologique
du reculer. Ce dernier est très important ;
- En effet, le reculer, c'est aussi l'apprentissage
de la discipline et de la soumission ;
- L'écuyer recommande, en particulier, au cavalier
de faire reculer le cheval qui récidive en commettant
le crime suprême, celui qui prend un appui excessif
sur la main : rien dans les mains, un point c'est
tout, sinon punition reculer.
Enfin, point extrêmement important, l'écuyer explique
au cavalier qu'il y a deux positions :
- Une position de travail, d'éducation du cheval,
et qui n'a rien à voir avec la position dite "
académique ".
- Cette position est provisoire ;
- Une position académique ;
- Le cavalier doit alterner les postures particulières
de la position de travail avec la position académique
qu'il emploiera de façon exclusive lorsque le
cheval sera éduqué ;
- L'écuyer donne pour finir chaque leçon, une
période de travail en position académique au cours
de laquelle, le cheval est mis en " récréation
" (le cavalier ne lui demande que des prises d'allures).
Bibliographie
Article réalisé par Jean-Yves Le Guillou
Le Guillou équitation
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